Padena a quitté la grand-scène…

mercredi matin 5 mai 2021, la nouvelle est tombée à la fois cruelle et apaisante : après des années de souffrance, Padena/Robert Marty s’est éteint ce mercredi matin 5 mai.

UN NOUVEAU DEUIL POUR L’ASSOCIATION LENGA VIVA …MAIS AUSSI POUR TOUTE L’OCCITANIE

Un très nombreux public ne connait que Padena,le comique occitan « avec son béret pour bannière et sa blouse de maquignon patinée par les ans, son blason». Mais qui était le bloc le plus important de cet étonnant iceberg occitan: le comique ou l’érudit ?

La notoriété du comique semblait submerger celle de l’érudit qui anima avec brio les cours de Lenga viva,l’univèrsitat occitan d’estiu de La guépia dont on ne peut oublier la session consacrée aux troubadours : l’humour faisant spontanément irruption, on devinait presque Padena soufflant à l’érudit Robèrt Marty.

Et comme il jubilait quand ses pourtant fidèles étaient confondus : « Même mes amis pouvaient s’y tromper : à la sortie d’un spectacle,racontait-il, un copain me croise et me dit « Ah ! Tu étais là toi aussi ! » . Souvenir mémorable également que ce spectateur à Lavit de Lomagne fier de dire à un homme élégant et distingué qu’il adore Padena « qu’il connaît très bien » sans se douter le moins du monde qu’il est face à lui…avant qu’il ne revête ses vêtements de scène qui vont le transformer en paysan rusé et avisé à l’humour parfois décapant mais où chacun se reconnaît ou reconnaît son voisin !

Il s’amusait d’ évoquer ce voisin paysan qui savait combien de sillons il labourait le temps d’écouter une de ses cassettes. Tout comme ce Montalbanais savait combien de centaines de kilomètres il avait parcouru en s’accompagnant des histoires de Padena qu’il connait par cœur ! Padena transformé en unité de mesure ! Où va se loger le succès ! La notoriété s’évalue aussi par ce compte-rendu d’un voyage en Chine par un club d’ainés « Alors, ce voyage ? Oh ! Extraordinaire, figurez-vous qu’il y avait Padena dans le même avion que nous » …

Né le 22 février 1944 dans une modeste ferme aveyronnaise où il reviendra à la retraite, il savait depuis l’enfance qu’il serait enseignant, il disait ne pas avoir choisi le métier tant c’était une évidence pour lui. Cependant en lui seul sommeillaient ou plutôt bondissaient plusieurs destins.

S’il fut professeur, de castillan, de français et bien sûr d’occitan,il fut aussi poète et écrivain,(reçu par Bernard Pivot),auteur de nombreux textes de chansons occitanes de Jacmelina et Eric Fraj. Président de l’Institut d’estudis occitan pendant dix, il créa la maison d’édition IDECO. De sa vie bouillonnante qu’il faut hélas ! Survoler,il faut aussi retenir la création de l’Ostal Bodon.Il se fit même leader politique,menant la liste occitane tarnaise aux premières élections régionales,fier entre autres d’avoir créé des affiches absolument extraordinaires où bien sûr l’humour restait sous-jacent.

Car,la respiration comique, Robert Marty la portait en lui. Il fit ses début d’artiste dans le restaurant de son épouse à Puylaurenç,en racontant des histoires en occitan pour faire patienter les clients.

« Dépassé par le succès », reconnaissait-il, il n’imaginait pas qu’il poursuivrait une carrière de près de quarante ans sur toutes les scènes d’Occitanie et bien au delà en déchaînant rires et passions. « Au grand dam de quelques « penseurs » pisse – vinaigre qui racontait-il,« me vomissaient parce que soi-disant, je dévalorisais la langue et la culture d’oc. » La contre-expertise d’inconditionnels de plus en plus nombreux- un public populaire mêlant toutes les générations sans populisme aucun-démontra tout le contraire. Il ne perdait jamais de vue que la langue d’oc était à la fois la clef et le moteur du spectacle. Un parler qu’il portait en lui,se souvenant du gamin turbulent qu’il était et que sa grand-mère menaçait : « Aresta, que se contunhas, un jorn te parlarai francés » / Arrête parce que si tu continues, un jour, je te parlerai en français. » Punition suprême pour celui qui ne découvrit la langue de Balzac ( de souche aveyronnaise aussi ) qu’à l’âge de cinq ans. en posant ses fesses sur les bancs de la communale.Que Pivot l’ait reçu dans « Apostrophes » pour la sortie de son « anthologie du roman populaire », ne changea pas une virgule à sa ligne de vie. C’est en oc que, romancier, il écrivit aussi, ses plus belles pages de « l’ombra doça de la nuèch ».

Entre comique et érudit, entre pile et face, entre Padena et Marty, ce Janus occitan laissera une trace indélébile auprès « d’afogats » /de passionnés venus nombreux l’accompagner  à sa dernière demeure pour rejoindre ceux et celles qui lui ont légué un héritage culturel qu’il a su faire partager avec tant de passion. Adiu l’Amic !

Que Josiane Daunis,sa compagne des bons et si mauvais moments et toute sa famille soient assurées des condoléances les plus vives de tous ceux que Padena fait pleurer aujourd’hui après les avoir avoir tant rire. Merci aussi à Robèrt Marty pour avoir tant assuré la promotion de notre culture car, je le cite « il faut promouvoir et non défendre car on ne défend que les causes perdues ». Personnellement je n’oublierai pas notre phrase clin-d’oeil « le g intervocalique à son dur a tendance à s’amuire » qu’il énonçait d’un accent très B.C.B.G !

Communiqué de Nadyne VERN-FROUILLOU

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