Le 2 février dernier, les élèves des sections mode et mécanique carrosserie du lycée professionnel Antoine Bourdelle ont été reçus dans le prestigieux lycée parisien Louis-Le-Grand accompagnés de leurs enseignants Gisèle Brassac, Eric Larroque pour les lettres-histoire, Angéla Como, Sandrine Lefrançois pour les métiers de la mode et Ysabelle Bourret, Christian Bely pour la mécanique/carrosserie.
Cette réception correspondait à la remise du prix Corrin qui récompensait leur projet sur l’enseignement de l’histoire de la Shoah. Ce projet « les malles d’Adèle » a permis aux rêves d’Adèle Kurzweil de se réaliser. En effet, Adèle, jeune fille juive autrichienne, réfugiée à Montauban et élève au lycée Michelet rêvait de devenir styliste. Mais en 1942, elle fut arrêtée à Auvillar avec sa famille et déportée au camp d’Auschwitz.
Des malles oubliées retracent la vie de cette jeune fille et notamment des cahiers d’écolière qui livrent des croquis de vêtements qui n’ont pas manqué d’émouvoir les jeunes générations. C’est l’historien Pascal Caïla qui a inventorié ces malles et permis de faire le lien avec les enseignants et les élèves du lycée.
Aussitôt, l’idée même d’un projet pluridisciplinaire prenait forme dans la tête de l’équipe enseignante .
Les sections des métiers de la mode du lycée ont donné vie au rêve d’Adèle en confectionnant les vêtements d’après les croquis de la jeune fille et la section mécanique/carrosserie a retracé la vie des familles juives durant la seconde guerre mondiale à Montauban, en particulier le parcours de la famille Kurzweil de Graz (Autriche) à Montauban. Pour approfondir leurs connaissances sur la déportation et le système concentrationnaire mis en place par les nazis, les élèves sont partis sur les traces des déportés et ont découvert le camp d’Auschwitz, accompagnés par Ginette Kolinka ancienne déportée et rescapée du camp. Celle-ci n’a de cesse, courageusement mais toujours avec un humour sans égal, de livrer son témoignage aux jeunes générations pour la Mémoire.
Séduits par ce projet, le jury du prix Corrin a tenu à récompenser élèves et enseignants par un diplôme et un livre pour chacun ainsi qu’une dotation de 1500€ pour les classes remis par la famille Corrin, Ariel Goldman, Philippe Joutard, Boris Cyrulnik en présence de Francois Icher IPR de l’Académie de Toulouse, de Charlotte Leprovost du mémorial de la Shoah et de nombreuses personnalités du FSJU.
Cette soirée était placée sous le signe de la mémoire mais aussi de l’optimisme pour des lendemains meilleurs.
Témoignages d’élèves :
Charlotte : « Durant plusieurs mois, nous avons soigneusement préparé puis réalisé le rêve d’une jeune femme. Une jeune femme comme nous : qui avait des amis, une famille, qui allait à l’école et surtout, qui avait des projets. Alors qu’elle vivait, comme nous tous, elle a été injustement tuée à Auschwitz, parmi des milliers d’autres. Pour lui rendre hommage, nous avons consacré notre temps, afin de réaliser ce rêve, afin d’estomper de sa mémoire, l’horreur qui l’a frappée ».
Lucy : « Le travail sur Adèle m’a permis d’ ouvrir les yeux sur plusieurs choses : la chance de mon présent. Je vis une belle vie. Certes, la vie a des aléas parfois assez violents, mais nous vivons en paix sans se cacher de quoi que ce soit. Je le savais avant, mais je le comprends d’autant plus avec cette expérience. Le métier que nous étudions est un talent précieux. Ce n’est même pas un métier, c’est un art. L’art de créer, l’art d’habiller dans la diversité, peu importe les personnes. C’était émouvant de réaliser le rêve d’une jeune fille inconnue, mais pourtant proche de nous. Nous sommes tous égaux, nous jouons, nous pleurons, nous connaissons de lourdes séparations, la peur, mais par-dessus tout, nous rêvons »
Communiqué par Robert Linas