Si les journées de Larrazet ont attendu leur 27e édition pour interroger la question de l’école, c’est peut-être que le sujet, de par ses multiples approches, incidences et parti pris nous dépasse tous un peu.
En réalité on ne sait trop par quel angle aborder le paysage de l’école tant le continent est vaste et nous prend souvent à contre-pied. Ce d’autant que les représentations et les clichés déforment ou caricaturent, trop souvent sans retenue, une réalité déjà sensible et complexe. C’est pourquoi les journées chercheront avant tout à dire de manière la plus fine, en collant à la réalité du terrain, ce qui se passe, ce qui se joue et se transforme sous nos yeux. Ce n’est pas du temps perdu, en raison des expériences fortes mais partielles de chacun, pour mettre en avant les dispositifs scolaires et pédagogiques qu’appellent notre temps.
Jean-François MATTEI sème un doute fécond « ce ne sont pas les enfants qui ne savent plus pourquoi ils vont à l’école, ce sont les adultes qui ne savent plus pourquoi leurs enfants doivent aller à l’école ». Il semble toutefois négliger le fait que les attentes de la société à l’égard de l’école sont et seront toujours multiples et contradictoires.
Antoine PROST, de son côté, va droit au but « l’école est là pour former des hommes et des femmes bien dans leur peau, capables de s’aimer et d’aimer leurs enfants. de faire la chaîne entre les générations, de créer une culture commune. De faire que les gens de 70 ans aient le même vocabulaire et se comprennent quand ils parlent à des enfants de 10 ans ou de 15 ans. La fonction de l’enseignement est fondamentalement humaniste, pas utilitaire. La fonction de l’école ce n’est pas de donner un emploi ».
À eux seuls, ils légitiment l’organisation de nos journées qui partent de l’idée que rien ne va de soi en matière d’école. L’école est une mécanique toujours effervescente, toujours incandescente qui gagnerait à faire un vrai retour sur soi pour prendre à bras-le-corps les aspérités du terrain et faire son miel des acquis de la recherche.
Quoi qu’il en soit, il va de soi que trop de discordances de toute nature entre l’école et la société alimentent des crispations et des malentendus. Nicole Catheline en pointe un et non des moindres « à la maison ou à l’école, ce n’est pas le même enfant et chacun (parent ou enseignant) parle de celui qu’il connaît ». Après avoir envisagé d’intituler nos journées « l’école entre fausses querelles et vraies questions », nous avons choisi un angle d’attaque plus fluide « la fonction de l’école est-elle toujours la même ? ». Questionnement qui permet d’éclairer la perspective historique, d’ouvrir le sujet à toute la constellation des visions, des savoirs, des témoignages. En un mot, faire respirer le sujet.
La démarche des journées et leur posture, à égale distance, de tous les acteurs de l’école offre un cadre idéal pour un dialogue, droit dans les yeux, entre chercheurs, enseignants, parents et citoyens. il est de la responsabilité et de l’intérêt de tous à ceux que les enseignants et la société, non seulement se tournent pas le dos, mais s’accordent sur la fonction de l’école dans la cité. C’est le pari des Journées de Larrazet, dans l’interactivité et le respect profond des convictions de chacun, pour ouvrir les portes de l’avenir.
Alain DAZIRON