Né à Castres en 1859 , bercé par la chanson que lui chantait sa mère, « Sòm, sòm, vèni, vèni, vèni» et ayant passé toute son enfance dans la petite ferme de La Fédial, Jean Jaurès était parfaitement bilingue depuis sa naissance.
Jeune professeur de philosophie, il assiste le 24 mai 1892 à Albi à la grande fête du Félibrige présidée par Mistral en personne et est promu secrétaire du comité d’organisation de la grande exposition agricole qui doit se tenir le lendemain.
Il y cotoie Auguste Fourès, Achille Mir, le chanoine Roux et le comte de Toulouse-Lautrec. Mais à la « taulejada »/(banquet) il ne prend pas la parole et l’ »estrambòrd » /(l’enthousiasme) des Félibres ne semble pas le gagner.
Dans l’une de ses toutes premières interventions à la Chambre, le 1er décembre 1888, demandant plus de moyens pour l’école primaire, il insiste sur les besoins : « Il y a une moitié de la France dans laquelle les instituteurs s’épuisent encore à apprendre les rudiments de la langue française à leurs élèves. » Mais c’est pour le développement de l’enseignement de la langue nationale qu’il plaide.
« Lo patés, lo parla tanplan coma ieu »/( Il parle le patois aussi bien que moi ) disait de lui Jean-Baptiste Calvignac, le premier maire socialiste de Carmaux. Dans ses contacts quotidiens avec ses électeurs, dans les campagnes tarnaises, mais aussi à Carmaux, à Albi, à Toulouse, ou au contact des vignerons du Bas-Languedoc, il emploie fréquemment l’occitan qui, dit-il, crée une familiarité entre celui qui parle et ceux qui l’écoute.
Grand lecteur, il connaît les troubadours, n’ignore ni Godolin ni les fables limousines de Foucauld, commente Aubanel, cite Anselme Mathieu. Admirant l’abbé Bessou et récitant par cœur des passages entiers de « Dal breç a la tomba », il n’hésite pas à polémiquer avec lui dans les colonnes de La Dépêche, lui faisant honte d’employer le mot de patois, mais lui reprochant de concevoir la « respelida »/(renaissance) de l’occitan en réaction contre le français et d’oublier la question sociale.
Qu’est-ce qui a pu le pousser, en 1911**, à demander l’enseignement de l’occitan, du basque et du breton à l’école publique, non pas de manière marginale et facultative mais grâce à une méthode comparée — ce que nous appellerions aujourd’hui le bilinguisme ?
Dans quelles circonstances, avec quels arguments, et quelles perspectives d’avenir ? C’est ce que Jòrdi Blanc, écrivain, philosophe et éditeur des œuvres de Jaurès se propose de développer lors de ses conférences .
** Quarante ans après Jaurès en 1911 à la Chambre des Députés, Frédéric Cayrou interviendra le 7 mai 1950 au Sénat, dans le cadre de la préparation de la loi Deixonne, pour en savoir plus Discours de Frédéric Cayrou au Sénat.
Une réflexion au sujet de « JAURÈS ET L’OCCITAN »