1212-2012 Histoire du Pays Albigeois (2)

Dans mon dernier article concernant l’année 1211, nous avons vu les premiers événements de la croisade menée contre les Albigeois, la prise de Lavaur, et la bataille de Castelnaudary. Par ce présent article, nous allons poursuivre cette épopée pour l’année 1212.

Reconquête de l’Albigeois par les croisés – Hiver 1211/1212

Fanjeaux (Aude), ancien nid d’hérétiques, demeure le centre de la garnison, le lieu d’attache de Simon IV de Montfort, car après chaque expédition, l’armée des croisés s’y ravitaille en soldats ainsi qu’en vivres, pendant l’hiver 1211/1212.
On ne sait si cet hiver a été plus clément que les précédents, ou si la situation est à ce point critique, qu’elle exige une action rapide. Peut-être que Simon IV de Montfort veut profiter immédiatement de l’aide substantielle de nouvelles recrues qu’il vient de recevoir. Toujours est-il, que pour la première fois depuis le début de la croisade de 1209, l’hiver n’interrompt pas trop la guerre.
À ce stade de la croisade contre les Albigeois, la première opération est menée en décembre 1211, contre les Touelles ou Toueilles (commune de Briatexte, Tarn), appartenant à Fredelon ou Frédol de Lautrec. Simon IV de Montfort en fait un charnier, il n’y a pas un seul survivant. Des Touelles, les croisés gagnent Albi afin de franchir le Tarn : Point à gué, mais à pied par le pont, évitant ainsi les localités riveraines, comme Gaillac, Rabastens, Lagrave qui se sont récemment rebellées.
À Gaillac se trouvent les comtes de Toulouse, de Comminges et de Foix, avec ce qui reste de l’armée méridionale qui s’est battue à Castelnaudary.
De la ville d’Albi, Simon IV de Montfort va mettre le siège à Cahuzac-sur-Vère. Le comte de Foix fait mine d’intervenir. Il envoie un messager à Montfort, pour le prévenir qu’il va l’attaquer. Il n’a certainement aucune intention de le faire, mais vise tout simplement à forcer les croisés à lever le siège de Cahuzac-sur-Vère. Un second messager renouvelle la menace. Mais Montfort ne voit toujours rien venir, alors il décide de passer lui-même à l’action. Il prélève sur ses effectifs une petite troupe et il se dirige vers Gaillac. À son approche, les trois comtes évite le combat mais cherchent à éloigner Simon IV de Montfort de Cahuzac-sur-Vère, ils décrochent et se replient sur Montaigut nouvellement soumis au comte de Toulouse. Montfort les poursuit donc jusqu’à Montaigut, mais trouve ce site abandonné, puisque l’armée de Raimond VI vient de gagner Rabastens. Alors, Montfort continue vers Rabastens où la même situation se produit. Les trois comtes ont délibérément fui vers Toulouse, abandonnant ainsi aux croisés toute la vallée du Tarn.
Simon IV de Montfort cesse de jouer au chat et à la souris, il revient devant Cahuzac-sur-Vère et décide d’en finir au plus vite, car mener un siège en hiver est une opération qui reste pénible et dangereuse. Le Bourg est pris rapidement au bout de deux jours. Les croisés y trouvent des vivres et ils y restent une semaine.

Carte extraite de l’épopée cathare de Michel Roquebert, éditions Privat.
Carte extraite de l’épopée cathare de Michel Roquebert, éditions Privat.

Le « nettoyage » du pays Albigeois récemment rebellé est loin d’être achevé. Cependant le légat du pape Arnaud Amaury suggère d’aller mettre le siège à Saint-Marcel sur la rive droite du Cérou. Il doit savoir que Raimond VI a laissé Guiraud de Pépieux à la tête d’une garnison chargée de défendre à tout prix la place.
Dans sa retraite sur Toulouse, si Raimond VI a renoncé à défendre l’Albigeois, il a néanmoins gardé trois places fortes, solides points d’appui, au Nord du Tarn, Saint-Marcel, puis sur l’Aveyron, les villes de Penne d’Albigeois et Saint-Antonin-Nobleval. Au demeurant, ce repli n’a certainement pas le sens d’un abandon, mais d’une tactique souple, visant à disperser les croisés et à désorganiser leur plan. En effet, à peine ont-ils mis le siège devant Saint-Marcel, d’un côté seulement de la ville, en raison de l’insuffisance de leurs troupes, que les trois comtes opèrent un brusque retour offensif. Ils pénètrent dans la place avec leurs armées. Ils se joignent ainsi à la garnison méridionale, laquelle bénéficie dès lors d’une écrasante supériorité numérique.
Au bout d’un mois, la situation a tellement empiré que Simon IV de Montfort préfère renoncer à ce siège de Saint-Marcel car l’armée des croisés est à bout de ressources et lève le camp le 24 mars 1212, pour s’en retourner à Albi.
Pendant ce temps le routier Martin d’Olite, laissé en garnison avec ses hommes à Cahuzac-sur-Vère, réalisent une certaine prise de butin sur les habitants de Gaillac et défont une troupe de cavaliers et de piétons qui s’est mise à sa poursuite.
À son tour, Raimond VI quitte Saint-Marcel avec ses alliés, pour aller à Gaillac. L’ayant appris, Montfort sort d’Albi avec une troupe de cavaliers et va chevaucher sous les remparts de Gaillac, provoquant les trois comtes. Ces derniers ne bronchent pas. Alors, Simon IV de Montfort s’en retourne à Albi.
Le 3 avril 1212, Simon IV de Montfort donne en fief à l’évêque Guillaume-Pierre ainsi qu’à ses successeurs, les châteaux de Rouffiac et de Marssac avec leurs dépendances. Puis plus tard, le chapitre cathédral obtient de Montfort une rente annuelle de vingt livres. L’évêque d’Albi qui paraît avoir favoriser la croisade dans notre région, trouve l’occasion d’agrandir ses domaines. Enfin, Simon IV de Montfort quitte Albi et marche sur Hautpoul autre nid d’hérétiques et de chevaliers faidits. Les croisés l’emportent en trois jours, puis prennent Sorèze le 23 avril 1212, que Montfort donne en fief avec plusieurs châteaux à Philippe Goloin.
Et dans un prochain article, nous verrons la poursuite en 1212 de la reconquête de la Terre d’oc par les croisés.

Gérard Veyries

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